LE PÈRE ARINTERO ET L’ŒUVRE DE L’AMOUR MISÉRICORDIEUX (1)
par le Père Pedro Fernández Rodríguez, O. P.
Traduction d'une conférence donnée en espagnol par le Père Pedro Fernández Rodríguez, o. p., au couvent de la Minerve (Rome), le 28 avril 2016, sous ce titre : "El P. Arintero y la obra del amor misericordioso en el jubileo de la misericordia".
Le P. Juan González Arintero est surtout connu comme restaurateur de la mystique traditionnelle, notamment grâce à son ouvrage majeur intitulé L’évolution mystique (1908). Cependant, mon propos est ici de le présenter comme Apôtre de l’Amour Miséricordieux. (…) La Mère Ezperanza de Jésus (1893-1983) est un fruit extraordinaire de cette œuvre, qui a créé le célèbre Sanctuaire de l’Amour Miséricordieux de Collevalenza (Pérouse, Italie). En pratique, c’est le P. Arintero qui a été choisi par la Providence divine pour diffuser cette dévotion et cette doctrine de l’Amour Miséricordieux, surtout par la revue “La Vida Sobrenatural”, qu’il fonda en 1921. (…)
Les premiers éléments de l’Œuvre de l’Amour Miséricordieux lui sont parvenus en février 1922, par un opuscule intitulé Les Petites Étincelles [en espagnol : Centellitas], sous la signature mystérieuse de P. M. [Petite Main], qui lui avait été envoyée par une demoiselle chilienne, Elvira Ortúzar, laquelle habitait en France. Le 15 février 1923, cette dernière fit connaître au P. Arintero l’identité de l’auteur, une religieuse française, de la même famille religieuse que celle de sainte Marguerite Marie Alacoque et de Benigna Consolata, salésienne de Côme (Italie), la “secrétaire” du Sacré-Cœur, dont le nom était Mère Marie Thérèse Desandais (1876-1943).
Mère Marie Thérèse Desandais, religieuse salésienne
Thérèse Desandais est probablement née à Dreux (Eure-et-Loir), en 1876. Fille unique, orpheline de père à six ans, elle apprit dès l’enfance à vivre avec la souffrance et à accepter l’obéissance. Par ailleurs, s’est développée en elle une grande passion pour la vérité et elle se sentait très attirée par l’amour. Le 30 septembre 1986, à l’âge de vingt ans, elle entra au monastère de Dreux, pour y prendre l’habit le 4 mai 1897. Sa vocation religieuse était cependant déjà claire depuis l’âge de neuf ans. Après sa profession religieuse, elle fut frappée par des épreuves physiques et morales qui ouvrirent son esprit à une spiritualité victimale. En 1902, après cinq années de vie religieuse, elle écrivit les premiers messages de l’Amour Miséricordieux, à savoir Le Trésor caché et la prière Offrande à l’Amour Miséricordieux. Le texte de cette dernière est le suivant :
« Père Saint, par le Cœur Immaculé de Marie, je vous offre Jésus, votre aimé Fils, et je m’offre moi-même en Lui, avec Lui et par Lui à toutes vos intentions et au nom de toutes les créatures. »
Pour elle, le Trésor caché, c’est Jésus, qui est également l’Amour Miséricordieux. Le contexte spirituel dans lequel est né le courant de l’Amour Miséricordieux est pleinement conforme à l’Ordre de la Visitation de Sainte Marie. À ce sujet, Mère Thérèse Desandais écrivait alors :
« Il n’y a rien d’extraordinaire à soupçonner au sujet de l’Amour Miséricordieux ; on trouve en lui l’application de l’esprit de notre Fondateur et la continuation de la dévotion au Sacré-Cœur de Jésus ».
Elle avait conscience de n’être qu’un simple intermédiaire des messages divins ; elle était seulement la « Petite Main » (P. M.) sous la dictée divine ; c’est pourquoi elle écrit à la première personne. Elle confesse avoir peur de ces moments où elle se sent poussée à écrire ; elle ne sait quoi écrire, mais ne peut faire aucune correction. Elle éprouve une grande crainte devant le surnaturel, mais elle ne peut s’opposer à la puissance divine. De 1902 à 1919, l’Amour Miséricordieux fut un trésor qui resta en son cœur et dans la communauté visitandine de Dreux. En 1904, la Mère Thérèse travaillait déjà à réaliser une image de l’Amour Miséricordieux.
En février 1904, écrit-elle, « lors d’une des manifestations du Seigneur, j’eus une première vision de ce que je devais faire : une image du Crucifié avec son Cœur, en plaçant l’offrande dans la partie inférieure. À la même époque, je vis que dans l’image devait apparaître la Croix, le Cœur et l’Eucharistie ».
Elle voulait représenter le visage du Christ vivant sur la Croix, modèle de souffrance consentie pour nous, la volonté de Jésus toute tournée vers la gloire de son Père et le salut des âmes. Au pied du Crucifix, était représenté le livre des Évangiles ouvert sur le chapitre 13 de l’Évangile de saint Jean, le commandement nouveau, illuminé par le Cœur. Dans la partie inférieure, on pouvait lire cette devise : « L’Amour Miséricordieux ». En 1916, elle ajouta une couronne royale au pied de la Croix. Les mystiques dominicains du 14e siècle avaient déjà uni le Sacré-Cœur et l’Eucharistie. Par ailleurs, le binôme Cœur et Croix du Christ était également présent dans le blason de l’Ordre de la Visitation, composé par son fondateur, saint François de Sales.
Inactive pendant quelques années, soumise à l’obéissance, Mère Thérèse continua la rédaction des messages en 1912. En 1914, elle peignit un grand tableau à l’huile de l’Amour Miséricordieux pour sa communauté religieuse. L’année 1915 fut très féconde : la Mère Desandais écrivit beaucoup, pour elle-même, pour sa communauté et pour le monde. En 1917, au cours de la retraite annuelle, elle écrivit l’opuscule Les Petites Étincelles, une synthèse de la doctrine et de la dévotion à l’Amour Miséricordieux.
Dans ces pages il est affirmé que la grande tragédie de l’homme est d’ignorer l’amour miséricordieux de Dieu, qui regarde sa misère avec compassion, avec le désir de notre paix et de notre salut. Lorsque l’homme se laisse aimer par Dieu, il réalise de bonnes œuvres, qui sont des fruits de l’amour. La Mère Desandais propose dans les pages de ces Petites Étincelles la pratique de la consécration spirituelle au Sacré-Cœur, c’est-à-dire qu’elle invite ceux qui ont consacré leurs familles au Sacré-Cœur à le faire également dans leur propre cœur, pour répondre ainsi à ce que Jésus attend de nous. Il est nécessaire de faire connaître l’amour de Dieu.
La Mère Desandais se considérait comme une continuatrice de sainte Marguerite Marie Alacoque (1647-1690), de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus (1873-1897) et de Sœur Benigna Consolata (1885-1897), visitandine du monastère de Côme (Italie). Il est important de souligner que l’Amour Miséricordieux n’était pas une nouveauté ; il s’agissait seulement de montrer la véritable dévotion à l’Amour du Sacré-Cœur de Jésus. Sa première référence à sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus date de 1923 ; en revanche, elle connaissait déjà Sœur Sœur Benigna Consolata, petite secrétaire de l’Amour Miséricordieux et victime d’amour pour la paix du monde, lorsque fut imprimée sa première biographie en 1918. La mission de cette dernière fut très semblable à celle de Mère Desandais. Les deux furent dépositaires d’un message que d’autres devaient faire connaître et le contenu du message était identique : l’Amour Miséricordieux sauvera le monde. Lorsqu’en 1919 la Mère Desandais écrit Appel aux amis du Cœur de Jésus, elle se présente comme la continuatrice de la Sœur Benigna Consolata, et par cette brochure elle les invite à faire partie de l’Association de l’Amour Miséricordieux. C’est ainsi que ce mouvement franchit les murs du monastère.
Au milieu de cette fièvre associative que connut cette époque, il manquait une association des amis du Sacré-Cœur de Jésus, s’attachant à aimer Jésus et le prochain, expiant par la pénitence les péchés du monde. Voyons comment, concrètement, s’est opérée la diffusion de l’Œuvre de l’Amour Miséricordieux en dehors du monastère. Laissons parler la Mère Desandais : →
ARINTERIANA
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Exposition en langue française de la vie et des œuvres du Père Juan González Arintero (1860-1928), restaurateur de la théologie mystique en Espagne, grand directeur d'âmes et apôtre de l'Amour Miséricordieux.
« Vous qui êtes ici, dites un Pater à mon profit.
Pour moi ferez beaucoup et vous n’y perdrez mie. »
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